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GenSight : un espoir pour lutter contre la neuropathie de Leber

GenSight Biologics, société biopharmaceutique dédiée à la découverte et au développement de thérapies géniques innovantes pour le traitement des maladies neurodégénératives de la rétine et du système nerveux central, a fait part de résultats complémentaires qualifiés de prometteurs issus de son étude de phase 1/2 visant à démontrer la sécurité et la tolérance de GS010 chez des patients atteints de la neuropathie optique héréditaire de Leber (NOHL). « Ces résultats préliminaires à 48 semaines constituent un espoir important pour les patients atteints de NOHL, une maladie très sévère pour laquelle aucun traitement curatif n'existe à ce jour » a indiqué le Dr. Catherine Vignal, investigateur de l'étude, Chef de service d'ophtalmologie à la Fondation Ophtalmologique Adolphe-de-Rothschild.

Il a pour l’occasion pris un « nom de scène ». « Monsieur Arthur », allure sobre et manières posées, restera anonyme. Il raconte sans emphase ni détours comment sa perception du monde s’est en quelques mois effacée à cause d’une maladie génétique jusqu’ici incurable, la neuropathie optique héréditaire de Leber (NOHL). Mais il est surtout venu témoigner de ce qu’a changé sa prise en charge par le Dr. Catherine Vignal, dans le cadre d’un essai clinique de la thérapie cellulaire GS010. « Monsieur Arthur » est l’un des quinze patients à qui a été injecté le produit, candidat actuellement le plus avancé de la société GenSight Biologics.

La neuropathie optique héréditaire de Leber est une maladie génétique rare, touchant 1 personne sur 31.000, à 80% des hommes. Elle se déclare le plus souvent à la fin de l’adolescence et chez les jeunes adultes, mais peut aussi bien toucher des jeunes enfants que des personnes âgées (d’apparition généralement tardive et moins sévère dans la minorité de cas féminins). Cette forme de neuropathie optique se remarque par sa brutalité, avec une baisse d’acuité allant fréquemment jusqu’à la cécité légale (soit moins de 1/10e ou 1/20e, le seuil diffère suivant les pays) en quelques semaines seulement sur le premier œil touché, le second étant affecté quelques mois après – ou simultanément dans un quart des cas. Seule la persistance d’une vision périphérique, en conjonction avec une rééducation basse vision, lui permet de se déplacer.

Le diagnostic n’est pas forcément immédiat, faute tout simplement de pratique puisqu’étant donné la rareté de la maladie, un ophtalmologue en cabinet ne rencontre que 2 ou 3 cas dans sa carrière. Etant donné le manque de connaissances cliniques sur la maladie, il arrive même qu’elle soit confondue au départ avec un trouble psychosomatique, avec les dommages psychologiques et le retard de prise en charge qu’on peut imaginer.
La NOHL est due à une anomalie de l’ADN de la mitochondrie, la « centrale énergétique » des cellules, qui possède son propre matériel génétique différant du seul ADN nucléaire. Les gènes mitochondriaux se transmettent seulement par la mère (ceux du père ne parviennent pas au noyau lors de la fécondation), la neuropathie de Leber est une affection à transmission exclusivement maternelle. Fréquemment, d’autres cas familiaux sont rapportés.

Pour « Monsieur Arthur », cela a commenté au cours d’un week-end estival par un flou persistant. De consultation en consultation, le diagnostic de la NOHL est tombé. Un cousin du jeune homme était déjà affecté, ce qui a rapidement aiguillé les médecins. « Le diagnostic a été établi en octobre ; à la Noël, je ne voyais plus que des formes. Vous perdez en quelques semaines la faculté de lire. D’utiliser un distributeur, de compter votre monnaie. Vous ne distinguez plus vos interlocuteurs, vos collègues de bureau. Et disparaît aussi le visage de votre femme… »

De Province, le patient a été adressé à la Fondation Rothschild où le Dr. Vignal lui a proposé de prendre part à une étude de phase 1/2 sur le GS010 : il a été le dernier des 15 patients recrutés, et a reçu en avril 2015 une seule injection du produit. Développée par GenSight, cette thérapie se base sur l’utilisation d’une séquence de ciblage mitochondrial (MTS), qui permet d’introduire un gène d’intérêt spécifiquement à l’intérieur de la mitochondrie grâce à un vecteur adéno-viral (AAV). Le gène d’intérêt peut alors y être exprimé et produire la protéine fonctionnelle qui permet de restaurer la fonction mitochondriale déficiente ou manquante, celle des cellules ganglionnaires de la rétine dans le cas de la NOHL. « Une intervention en local de quelques minutes, une nuit d’hospitalisation à titre de surveillance ».

Aujourd’hui, si son handicap demeure bien sûr important dans l’absolu, le « patient 15 » a énormément gagné en qualité de vie. La perception des couleurs et des contrastes en particulier s’est beaucoup améliorée. « Maintenant je sais si le feu est au rouge ou au vert. Dans le métro, je peux lire le nom des stations si elles sont en grosses lettres. De quoi se déplacer en autonomie», témoigne-t-il. Dans l’essai de phase 1/2, certes non conçu pour démontrer une efficacité clinique, 5 des patients (ceux touchés depuis moins de deux ans) ont connu comme « Monsieur Arthur » un progrès significatif de la vision, selon des données complémentaires présentées mercredi.

En parallèle des données de tolérance, 48 semaines après l'injection, chez les patients ayant développé la maladie depuis moins de deux ans, un gain de 30 lettres (-0.59 LogMAR) a été observé dans l'œil traité contre +13 lettres (-0.25 LogMAR) dans l'œil non traité, soit une différence de +17 lettres en faveur de l'œil traité. Aucune différence notable n'a été observée en revanche chez les patients diagnostiqués depuis plus de deux ans (plus de 20 ans pour certains).

Pour Bernard Gilly, PDG de GenSight Biologics, ces données préliminaires sont extrêmement encourageantes et valident le design des deux études de phase 3 actuellement en cours aux États-Unis et en Europe (chez des patients ayant subi une perte d'acuité visuelle depuis moins d'un an). Ces essais, baptisés RESCUE et REVERSE, constituent la dernière étape avant le dépôt du dossier d’approbation réglementaire pour la commercialisation de GS010 espérée dès 2018. À plus long terme, la technologie de ciblage mitochondrial de GS010, pourrait être utilisée dans le traitement d’autres maladies mitochondriales notamment certaines maladies oculaires ou des maladies neurodé-génératives du système nerveux central, comme la SLA ou le Parkinson.

Quant à « Monsieur Arthur », qui a pu reprendre son travail à l'automne 2015 avec certains aménagements, il n'attend plus qu'une chose : pouvoir bénéficier du traitement pour le second oeil maintenant que l'innocuité du traitement a été établie.

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